Don’t Talk To Me About Work

L’enfer est pavé de bonnes intentions… tout comme un gros livre rouge que nous connaissons fort bien. Le Code du Travail et les Conventions Collectives ont le mérite d’exister, certes, mais les beaux principes sont tantôt méconnus (volontairement, ou involontairement), tantôt détournés, tantôt raillés, tantôt ignorés.

Les « règles du jeu » de la sphère professionnelle sont également, parfois, anachroniques. Les temps changent. Le marché de l’emploi change. Le rapport au travail change. Les textes, eux, s’empilent et sont modifiés à une cadence souvent trop lente…

Prenons l’exemple du droit à la déconnexion. Le « grand public » a commencé à en entendre parler en 2015, lors de la remise d’un rapport sur le sujet par Bruno Mettling, alors Directeur Général adjoint chez Orange. On s’inquiétait, à cette époque, de l’impact des outils numériques, à usage professionnel, sur le bien-être des collaboratrices et des collaborateurs, ainsi que sur leur équilibre de vie. La Cour de cassation avait déjà jugé que « le fait de n’avoir pu être joint en dehors de ses horaires de travail sur son téléphone portable personnel est dépourvu de caractère fautif et ne permet donc pas de justifier un licenciement disciplinaire pour faute grave »… en 2004 !!!

Il faut attendre 2017 pour que le droit à la déconnexion fasse son apparition dans le Code du Travail, de manière pratiquement anecdotique. D’un sujet à aborder obligatoirement lors des négociations annuelles, le droit à la déconnexion est devenu, un an plus tard, une disposition supplétive, avec les « ordonnances Macron ». De plus, en l’absence d’accord sur le sujet, les entreprises doivent mettre en place une (simple) charte sur l’utilisation des outils numériques et l’importance de se déconnecter.

Une patate chaude sans chair. Un épouvantail qui ne fait peur à personne. Une bonne intention qui fait sourire. Ou pire : un symptôme de plus chez un patient qui souffre d’une maladie tenace et dont le remède n’existe pas encore…

Fin janvier 2021, « les députés européens ont invité la Commission européenne à élaborer une loi donnant le droit aux salariés de se déconnecter en dehors des heures de travail sans subir de répercussions négatives ». 

Oui mais…: c’est quoi au juste les « heures de travail » ? 

Avant l’heure, c’est pas l’heure. Après l’heure, c’est plus l’heure. Certes. 

Quelles sont les heures de travail d’un cadre autonome aux 35 heures

Quelles sont les heures de travail d’un cadre au forfait jours ? 

Que peut-on considérer comme « heures de travail », quand on ne pointe pas ? Est-ce que chasser des candidats sur LinkedIn, quand on regarde sa série Netflix, à la pause déjeuner, c’est du temps de travail ? Est-ce que répondre à sa nounou, en plein milieu d’une tâche barbante, c’est toujours du temps de travail ?

Bien souvent, la réponse à ces questions est la suivante : les heures de travail de la personne A doivent coïncider avec les heures de travail de la personne B (N+1). Et comme il existe un véritable culte du présentéisme… Il existe, par conséquent, un culte de la connectivité et de la disponibilité.

 

L’actweet RH

Souple et solide à la fois…

Le télétravail, au ministère du Travail, on le veut ferme, mais pas trop… La ministre a précisé la façon dont le gouvernement comptait s’y prendre pour « remobiliser » tout le monde face à l’érosion constatée du télétravail, notamment en banques et assurances. #Pataquès

Discriminations chez Google…

C’est un nom qui fait rêver beaucoup de candidats, mais la réalité est toute autre. Google a accepté de payer 3,8 millions de dollars, après avoir été épinglé pour discriminations : 2 565 collaboratrices et 3 000 candidates et candidats asiatiques recevront une indemnité. #Grillé

Coup de pouce à l’emploi local…

Trouver un travail, via un groupe Facebook, c’est possible ! En janvier 2020, Magali Merour, une Brestoise, a créé le groupe « Offres d’emploi Brest et alentours »… Un an plus tard, il compte 5 000 abonnés et une cinquantaine de personnes ont trouvé du travail ! #OldGoodSchool

 

Info cognito  : présentéisme et absentéisme sont dans un bateau

C’est la base de la fonction RH, aussi gravée dans votre tête que la devise républicaine l’est aux façades des mairies : le travail salarié est régi par des lois. Le temps de travail, c’est-à-dire la part de nos vies que nous avons cédées en gestion à nos employeurs, est compté selon des règles précises. Nul n’y échappe, pas même les cadres. Et vous veillez scrupuleusement à ce que vos salariés appliquent avec rigueur la règle (35h pour tout le monde) et ses nombreuses déclinaisons.  

Autre famille de règles inextricables : les rémunérations. Tout le monde travaille 35 heures, mais pas au même salaire. Et la justification de ces écarts est un casse-tête. C’est pourquoi il vous paraît normal, malgré les 35 heures pour tous, que les cadres ne désertent pas le bâtiment dès 17 heures, qu’ils n’attendent pas la fin du weekend pour répondre à leurs mails et, surtout, qu’ils ne disparaissent pas, certificat médical à l’appui, au moindre bobo. Ceux qui sont payés plus devraient en faire plus. 

Le présentéisme, ou le culte de la présence excessive sur le lieu de travail, ne se limite pas à rester au bureau tard. C’est surtout aller au travail alors que son état de santé physique ou psychologique ne devrait pas le permettre. Les données de la DARES montrent que les salariés français déclarent en moyenne onze jours de maladie par an, mais seulement huit d’absence pour maladie. Le décalage de trois jours décrit l’ampleur du présentéisme : 27% des jours de maladie sont en réalité travaillés au lieu d’être consacrés au repos. 

L’étude de la DARES permet d’éclairer les causes du présentéisme. Certaines, comme le statut, sont prévisibles : la propension au présentisme des cadres est supérieure à celles des autres types de salariés. On y reconnait l’engagement typiquement attendu et manifesté par ce groupe de salariés. D’autres causes, comme l’âge, sont plus inattendues : la propension au présentéisme des salariés âgés de plus de 60 est supérieure à celles des autres, sans doute pour lutter contre le stéréotype qui associe âge, maladie et désengagement. 

Enfin, les conditions de travail jouent un rôle : l’insécurité économique, l’intensité du travail, la pression temporelle, un temps de travail non-standard ou le sentiment qu’on manque de moyens pour faire correctement son travail favorisent le présentéisme. Paradoxalement, les causes du présentéisme sont presque exactement les causes auxquelles la pensée spontanée attribue le comportement inverse d’absentéisme.

Conclusion ? La prochaine fois que vous verrez un cadre quitter l’entreprise tôt, aller jusqu’au bout de son congé maladie ou se flatter de ne pas toucher à ses mails professionnels du week-end, encouragez-le. Il lutte contre l’absentéisme.

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